Bonnard


Jean Clair
Éditions Hazan


Au vu de l’exposition présentée au musée d’Art moderne de la ville de Paris, l’ouvrage de Jean Clair peut être un bon moyen pour essayer de mieux comprendre et apprécier Bonnard. En deux chapitres – Le monde et La peinture – l’auteur nous décrit l’homme avec beaucoup d’humanité et nous explique également l’œuvre de l’artiste. Jean Clair ne s’encombre pas d’éléments biographiques inutiles. Il nous expose avec beaucoup de précision, mais aussi de poésie, ce qui se dissimule derrière cette figure célèbre. À cheval sur le XIXe et le XXesiècle, il n’est pas aisé de classer Bonnard. Ce qui est sûr, c’est qu’il n’a jamais suivi le(s) mouvement(s). Comme le dit très justement l’auteur, c’est un artiste “à rebours”. Contemporain des Futuristes, Bonnard ne peint presque exclusivement que des nus : “passion périmée” pour la peinture au début du XXe siècle, mais Bonnard s’y investit corps et âme. Ses confrères s’empressent de se réclamer de telle ou telle école : lui reste loin, solitaire. Ce qui importe plus que tout à Bonnard c’est le temps qu’il fait, et non le temps qui passe. Il est l’observateur des variations climatiques et l’on retrouve ces nuances dans ses toiles, comme s’il avait voulu les traduire en peinture en s’employant à reconstituer quelques instants furtifs mais très singuliers auxquels il ne se confronte véritablement que dans l’après-coup. Ainsi, la mémoire joue un rôle important dans son œuvre : il se laisse envahir par des sensations, des émotions puis le souvenir livre en quelque sorte la quintessence de cet instant. L’auteur résume ceci en ces termes : Bonnard “peint un réel transfiguré par l’émotion du souvenir”. L’artiste s’attache donc à la nature, mais pas seulement. Lorsqu’il peint un paysage, il n’est pas rare qu’une scène d’intérieur partage l’espace de la toile. Il utilise d’ailleurs souvent la porte-fenêtre afin d’abolir les frontières entre le dehors et le dedans et d’ouvrir l’espace. On a alors du mal à dire si c’est un intérieur vu de l’extérieur ou l’inverse. Le miroir est l’autre élément récurrent dans les toiles de Bonnard, il permet de “briser la continuité perspective”, mais également “d’articuler l’un sur l’autre deux espaces incompossibles”. L’artiste se sert également du miroir pour se laisser surprendre par son modèle et les poses qu’il prend. Après la mort de Marthe – sa compagne, son modèle – Bonnard se laissera lui-même surprendre par son reflet comme en témoignent les autoportraits réalisés à la fin de sa vie.

Aurélie Portet



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