Bernard Faucon


Christian Caujolle
Éditions Actes Sud


Il est rare qu’un artiste décide de mettre un terme à son œuvre. C’est ce qu’a pourtant fait le photographe Bernard Faucon en 1995. “Il fallait bien un jour que je donne une réalité à ma prétention d’en finir, à mon obsession de clore. C’est devenu La Fin de l’Image”. Ainsi, après une trentaine d’années de travail et avoir compté comme l’un des tout premiers à réaliser ce qu’on a appelé des “images fabriquées”, Faucon décidait-il d’arrêter toute production photographique. Si l’histoire de ce médium s’est dès lors trouvée orpheline d’une démarche unique en son genre, elle gagnait aussi par là l’inédit d’une attitude face à la création comme il en existe très peu. On pourra toujours gloser sur les raisons d’un tel parti pris, mais l’avantage que l’analyse critique peut en tirer est l’appréhension qu’il offre de pouvoir contempler tout l’œuvre dans une extension et une complétude absolues. Aussi l’ouvrage qu’a édité Actes Sud se présente-t-il comme un catalogue raisonné – et le premier du genre concernant le travail d’un photographe. Il est surtout l’occasion de prendre la pleine mesure de la démarche d’un artiste en quête d’un monde rêvé, entre une première série d’images réalisée dans les années soixante – Le temps d’avant– et sa clôture. Si les compositions que Bernard Faucon a conçues, notamment celles avec ses mannequins, ont su s’imposer comme l’illustration de la quête d’un ailleurs, c’est qu’elles sont fortes d’un idéal de beauté pure et innocente qui appartient à l’homme en son for intérieur. Qui lui est consubstantiel. Non seulement l’œuvre, immense et limitée, de Bernard Faucon a su régénérer une pratique en lui conférant une dimension nouvellement plasticienne mais elle compte parmi ces événements, tout à la fois fabuleux et merveilleux, qui qualifient une époque tout en la transfigurant.

Philippe Piguet



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