Cécile Reims grave Hans Bellmer


Pascal Quignard
Éditions Cercle d’art


Des corps de femmes entremêlés, vulves, phallus, bras, jambes et tabourets se confondant dans un amas informe et étrangement familier, ainsi l’oeuvre d’Hans Bellmer saisit Cécile Reims, lorsqu’elle la découvre au lendemain de la guerre. Née Tsilinka Remsas, d’une famille juive de Lituanie, Cécile Reims partage une identité clandestine avec l’artiste surréaliste, lui, pourvoyeur de faux papiers pour la Résistance, elle, engagée dans le combat pour la Libération. Elle ne sait alors pas encore qu’elle sera son graveur attitré, et ce jusqu’à sa mort, en 1975, d’autant qu’elle abandonne le burin pour le métier à tisser afin de subvenir à ses besoins, pendant de longues années. C’est grâce à l’éditeur Georges Visat qu’elle prête sa main à Bellmer, devenant dès lors la main anonyme d’un artiste dépressif et tourmenté. Leurs rapports furent alambiqués, empreints d’estime et de retenue, même quand, un jour après le suicide d’Unica Zu?rn – la compagne d’Hans Bellmer – défenestrée au retour d’un séjour à Maison-Blanche, Cécile Reims présente sans mot dire les gravures qu’elle était venue montrer. C’est cette étrange épopée que nous fait revivre Pascal Quignard, qui unit dans un même ouvrage une biographie désarticulée, comme les poupées, au poétique, au mythologique. Cécile Reims elle-même se confie ensuite dans un texte, évoquant ses relations avec l’artiste allemand. Puis l’artiste Fred Deux, son époux, raconte à son tour ces rencontres déterminantes. Enfin, un court texte de Laure Beaumont-Maillet retrace brièvement l’histoire de la gravure, ou du moins son statut à travers les âges, entre art et artisanat, de sorte à rendre un ultime hommage à Cécile Reims, qui, plus qu’une simple interprète, était la continuation créatrice de Hans Bellmer, son bras et sa tête.

Antoine Fonsagrive


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